Le mariage, le sens des différentes étapes du rituel

30 septembre 2017 : Mariage célébré à l'église Saint-Ambroise. Paris (75), France.

30 septembre 2017 : Mariage célébré à l’église Saint-Ambroise. Paris (75), France.

Acte d’alliance d’un homme et d’une femme unis par un même amour, le mariage est aussi le lieu d’une révélation.

Le rituel du mariage est un véritable chemin de proposition de la foi. Il propose une intelligence du sacrement, à travers les étapes de la célébration, les paroles échangées, les prières proposées, les textes de la parole de Dieu, les gestes posés.

Le rituel ouvre des portes à une réflexion approfondie sur la liberté, la fidélité, l’alliance, le dialogue dans le couple, l’écoute mutuelle, la sexualité et la chasteté. Quant au mystère pascal, il y trouve sa place.

Nous pourrons aussi regarder comment sont mis en valeur les liens du mariage avec les autres sacrements, tous au service de la communion de l’Eglise. Il ne peut s’agir d’un sacrement isolé, sans lien avec une vie sacramentelle.

Un sacrement n’est jamais un en-soi ; il ne peut enfermer ceux qui le reçoivent, mais il ouvre aux autres, proches ou lointains, au monde, et il devient signe du Royaume. Il conduit au Christ. Et pour rencontrer le Christ dans la liturgie, il convient de se préparer à accueillir le don qu’il fait, de s’ouvrir à lui. L’enjeu du rituel n’est pas du domaine du faire mais du « se laisser faire ». Le chemin proposé est celui de l’intériorité et de la découverte de la foi au Christ, un chemin parcouru et accompagné en Eglise.

Les rites d’ouverture de la célébration

« Le prêtre (…) se rend à la porte de l’église, accueille les futurs époux et leur souhaite la bienvenue pour montrer que l’Eglise prend par leur joie. » « Ensuite, on se rend à l’autel en procession (…) »

Le but du chemin d’humanité est la rencontre du Christ que l’autel symbolise. D’emblée, la liturgie centre les époux et l’assemblée sur celui qui vient partager leur joie et sanctifier leur union. Une célébration sacramentelle n’est pas qu’un ensemble de rites mais bien un chemin de rencontre avec le Christ et, par lui, avec Dieu.

Le signe de croix montre que le Dieu de Jésus Christ est un Dieu Père, Fils et Esprit, qu’il offre à chacun grâce et bonheur, que le mariage trouve son sens dans une alliance plus grande : celle du Christ et de l’Eglise. Le signe de croix est un signe baptismal qui permet de faire le lien entre baptême et mariage Dès lors un chemin avec le Christ est ouvert, il se fait avec les autres et en Eglise ; il favorise l’écoute de la parole de Dieu, prend Dieu à témoin et lui demande de combler les futurs époux de l’Esprit. La vérité des mots prononcés suppose que la grâce demandée puisse être accueillie, reçue par des cœurs ouverts à la proposition que Dieu fait. L’Eglise ne demande pas d’emblée une foi pleine et entière ; elle pose la question de l’ouverture du cœur à la réception de la grâce. Si les cœurs sont ouverts et sincères, le chemin est possible ; il fera découvrir le Christ et pourra proposer la foi.

Les prières d’ouverture

Le  rite d’ouverture se termine par une oraison. Le but de ce rite est de conduire à la prière, dans un dialogue confiant avec un Dieu qui se fait proche de l’homme et lui permet de s’adresser à lui. Cette prière s’adresse à Dieu, qualifié de Seigneur, Tout-puissant, Père. Les trois qualificatifs cités ne sont pas ausi antagonistes qu’il y paraît à première vue. C’est un visage de Dieu qui se dessine, le visage d’un Dieu aimant.

Ensuite, les oraisons, profondément ancrées dans l’engagement qui va être pris, déroulent un certain nombre de thèmes propres au mariage : l’union du Christ et de l’Eglise (oraison n°1), le témoignage de foi (n°4), la fécondité (n°6), la proximité du Christ, compagnon de route (n°7), l’amour et la communion conjugale (n°6), autant de thèmes familiers, déclinés dans l’ensemble du Rituel. D’autres prières présentent une forme et un contenu plus nouveaux permettant de dévoiler certains aspects du mariage : la consécration de l’amour mutuel (n°8), la présence amicale et affectueuse d’une assemblée (n°9), l’importance de la parole de Dieu (n°9).

La lecture des oraisons (n°7 et 8 particulièrement) ouvre à une dimension christologique : l’union du Christ et de l’Eglise. Cet aspect est présenté de manière simple : par le don de sa vie, le Christ donne l’exemple de l’amour de Dieu, d’un amour total pour l’humanité. S’aimer, c’est se donner totalement l’un à l’autre et trouver dans le Christ la source et le modèle de tout amour.

Dans les oraisons du Rituel, la place et le rôle de Dieu sont mis en valeur de manière nette. Le verbe est passif, ce qui ne veut pas dire que les époux deviennent les spectateurs du sacrement. Ils ont une place nettement affirmée dans l’échange des consentements, mais c’est Dieu qui consacre leur union.

Les oraisons font prendre conscience aux futurs époux de la place de Dieu dans leur cheminement et dans la célébration du sacrement.

Cheminer avec la parole de Dieu

C’est avec les futurs époux eux-mêmes, selon l’opportunité, que seront choisies les lectures d’Ecriture Sainte qui seront expliqués durant l’homélie.

Pour qu’il y ait conversation, il faut être deux. Si Dieu entre en conversation avec l’homme, il en attend une réponse. Dans le cadre du mariage, il ne saurait y avoir une réponse unique : à chaque couple de trouver sa réponse sur le chemin que Dieu propose. La prière peut en être une, tout comme le partage de la Parole, l’attention renouvelée aux autres, un engagement dans le monde, le souci de partager la foi avec les enfants, le désir de retrouver plus souvent d’autres chrétiens, etc…

Prendre le temps de se laisser faire par la parole de Dieu, entrer en conversation avec celui qui vient nous rejoindre sur nos routes humaines est une étape nécessaire pour vivre la plénitude d’une rencontre sacramentelle. Le but ultime de l’écoute, du dialogue, de la conversation est de permettre à chacun des fiancés de répondre à la question de l’autre : « Pour toi, qui suis-je ? » et à la question que le Christ posait à ses disciples : « Pour vous, qui suis-je ? »

Tous les couples n’arriveront peut-être pas, dès le début, à une formulation claire de la confession de foi. Mais la découverte de la parole de Dieu comme chemin de vie où les questions fondamentales sont posées peut se révéler productive. L’important n’est pas une réponse immédiate mais le chemin engagé où chacun est appelé à vivre l’expérience pascale avec le Christ et à le reconnaître comme le modèle de tout amour.

Un sacrement à vivre

L’invitation à échanger les consentements, l’échange lui-même, ne sont pas de simples formules rituelles. S’en tenir à cette perception risquerait de transformer le sacrement en un rite magique. Elles engagent les époux sur un chemin de disponibilité et d’exigence à vivre au quotidien : fidélité l’un à l’autre, mais aussi aux enfants, dans les jours de bonheur comme dans les épreuves ; acceptation de porter ensemble toutes les responsabilités du mariage jusque dans l’épreuve et la maladie ; accueil et respect de l’autre, tout cela dans une démarche libre, une démarche que l’on engage pour toute la vie. Tous ces éléments qui composent les différentes formules ne sont pas des mots en l’air. C’est dans la vie quotidienne que la grâce sacramentelle accompagne les époux et leur permet sans cesse de renouveler le « oui » d’un jour. Recevoir la grâce du sacrement et l’accueillir en vérité, c’est accepter de mettre son couple au régime de l’Esprit Saint ; c’est accepter d’avancer un peu plus chaque jour vers la sainteté ; c’est s’engager à prendre, pour toute vie, un chemin de croissance spirituelle. Il s’agit bien d’un sacrement à vivre.

Quand la bague devient alliance

La remise des alliances visualise l’engagement pris par les époux. La formule qui l’accompagne reprend les thèmes de l’amour et de la fidélité. Quant aux formules de bénédiction, elles insistent essentiellement sur le signe donné par les alliances échangées et portées au doigt. Signes d’amour, de fidélité, de tendresse, elles sont aussi le rappel d’un amour partagé et, plus encore, le signe d’une présence réciproque, même dans l’absence physique et par-delà la mort. C’est en cela qu’une simple bague devient alliance. En inscrivant l’alliance des époux dans l’alliance de Dieu avec l’humanité, le sacrement de mariage ouvre les époux à une perspective nouvelle, celle d’une mystérieuse présence de l’un à l’autre dont l’alliance portée signifie la permanence.

Le lien entre baptême et mariage est essentiel car l’engagement de deux baptisés devant Dieu et l’Eglise trouve son fondement dans l’engagement premier de Dieu lors de la célébration du baptême. De même, la foi des mariés prend tout son sens dans la foi de l’Eglise exprimée au baptême. Ainsi, le mariage est un  déploiement de la vie baptismale.

La place de la bénédiction nuptiale

Le rituel envisage deux moments possibles pour la bénédiction nuptiale. En fonction du moment où elle est donnée sa portée théologique n’est pas la même. Après le Notre Père, elle manifeste clairement le lien entre le sacrement de mariage et l’eucharistie, mais elle ne fait pas partie de la séquence proprement sacramentelle des rites. En effet, la précision du Rituelà propos du chant de louange après la remise des alliances (« En signe de reconnaissance pour le don du sacrement de mariage… ») laisse entendre que la bénédiction nuptiale ne fait pas partie de l’acte sacramentel. Et la prière des époux qui suit ce chant indique bien, par son intitulé, que le sacrement a été donné. C’est alors l’échange des consentements qui réalise le mariage. Cette disposition met essentiellement en valeur le rôle des époux dans l’échange sacramentel.

Quand la bénédiction nuptiale est située après l’échange des consentements, elle prend une tout autre dimension. Elle indique plus nettement Dieu comme acteur du sacrement en lui demandant d’envoyer son Esprit pour consacrer les époux à leur nouvelle mission. Prononcée avec le geste d’imposition des mains, la bénédiction nuptiale prend alors une dimension consécratoire, c’est à dire qu’elle demande la sanctification des personnes.

Même si elle n’a pas la même portée en fonction du moment où elle est située, la bénédiction nuptiale est un élément majeur de la célébration du sacrement.

Les différentes formes de la prière

La prière des époux

Elle pourrait sembler secondaire, puisque le rituel la rend facultative. Elle tient cependant une place importante car elle est la réponse des époux à Dieu pour le don de sa grâce. Nous sommes dans la posture de l’échange : au don de Dieu, les époux répondent par l’action de grâce. Les maladresses de l’expression ou les hésitations de la lecture importent peu ; l’essentiel est qu’à ce moment précis de la célébration, les époux entrent en dialogue avec Dieu dans la dynamique du don et de la réponse : à la grâce reçue je réponds par l’action de grâce.

La prière universelle

C’est une autre perspective qui s’ouvre. Un sacrement n’intéresse pas uniquement ceux qui le reçoivent, au risque de les enfermer dans un cœur-à-cœur chaleureux avec Dieu. Tout sacrement, puisqu’il est signe de salut donné au monde, ne peut qu’ouvrir à l’universel. La parole de Dieu entendue et actualisée, le don du sacrement ne peuvent qu’ouvrir les cœurs au monde, et déclencher le désir de « prier pour… »

Le Notre Père

C’est la prière par excellence, celle de l’ajustement des mots à la profondeur de la relation, celle que le Seigneur nous a laissée. Elle requiert une autre posture, une autre manière de prier. Les mots du Christ lui-même engagent le chrétien sur la voie de

l’intimité avec un Dieu que l’on ose appeler « Père », mais aussi sur la voie de la confiance et de l’abandon total entre les mains d’un Dieu, tendresse et pitié. C’est aussi la prière de la Tradition, la prière reçue de l’Eglise, des parents ; la prière que les époux auront à transmettre à leurs enfants.

Témoignage au monde et vie spirituelle

Les bénédictions finales reprennent de manière synthétique les thèmes déjà abordés ailleurs dans la célébration et offrent l’opportunité de regarder quel avenir le sacrement ouvre aux nouveaux époux. Les éléments de la bénédiction sont assez révélateurs de la manière dont l’Eglise envisage le sacrement comme nourriture pour témoigner au monde l’amour de Dieu.

Ainsi la dernière bénédiction finale met en exergue la vie de famille, les amis, l’accueil des malheureux et des pauvres et, au terme de la vie terrestre, la vie éternelle en Dieu. La troisième bénédiction invite les époux à être les témoins de la résurrection du Christ. La quatrième bénédiction ouvre à une vision de la vie ordinaire pleine de l’amour de Dieu et, de ce fait annonciatrice du Royaume dans le plus quotidien de la vie. La cinquième bénédiction, reprenant les mêmes aspects, ouvre davantage au témoignage d’une vie évangélique.

Ainsi, c’est à une vie renouvelée par le sacrement que les époux sont invités, une vie quotidienne qui témoigne de l’amour de Dieu et annonce son Royaume de justice et de paix.

La signature des registres : un geste qui engage

La signature des registres vient clore la célébration. Elle formalise, par un écrit non seulement l’échange des consentements, mais tout ce à quoi la célébration engage. Manière de préciser que la signature apposée sur les registres de catholicité n’a pas la même portée que celle qui avait été apposée sur les registres municipaux.

Mariage et eucharistie

Si on considère le sacrement de mariage comme le signe de l’union du Christ et de l’Eglise, son lien à l’eucharistie, signe suprême de l’Alliance de Dieu avec son peuple, est évident. Et l’eucharistie donne sa pleine signification à l’alliance des époux dans le mariage.

L’eucharistie est le mémorial d’Alliance, don total de l’amour et action de grâce. La fidélité d’alliance entre les époux est signe de l’Alliance du Christ et de l’Eglise, alliance scellée dans sa mort et sa Résurrection ; l’eucharistie, preuve suprême de l’amour du Christ, est actualisation de la consécration baptismale ; source de la fidélité, de l’amour du conjoint et des prochains, source de la vie ecclésiale et de l’action de grâce pour l’amour reçu.

Cet article a été écrit à partir d’articles de la revue Célébrer, n°336, 341, 377, 378, 379, 380, 381, 382, 384.

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